Très sale temps pour l’ancien président de l’Assemblée provinciale de Kinshasa, Roger Nsingi Mbemba, interpellé pour une affaire de détournement de dix véhicules appartenant à cette institution. Placé en garde à vue le vendredi 5 avril, le speaker honoraire de l’organe délibérant de la ville province de Kinshasa, a été l’objet d’ouverture d’un dossier judiciaire. ?Roger Nsingi ne sera relâché que s’il nous nous amène les véhicules », avait déclaré le Commissaire provincial de la PNC Kinshasa, Sylvano Kasongo.
Face à l’irrésistible pression de la PNC demeurée imparable depuis le début de cette affaire, Roger Nsingi a fini par remettre six des dix véhicules que lui et certains de ses proches collaborateurs détenaient indûment. Les six engins roulants ont été présentés à la presse le samedi 6 avril. La cérémonie s’est déroulée devant Godefroid Mpoyi, Léon-Junior Nembalemba et le général Sylvano Kasongo, respectivement actuel Président de l’assemblée provinciale, rapporteur de l’assemblée provinciale et Commissaire provincial de la PNC Kinshasa.
DES PROURSUITES JUDICIAIRES POUR USAGE DE FAUX
Arithmétiquement, il ne reste plus pour Roger Nsingi que quatre véhicules à restituer au Bureau de l’actuelle assemblée provinciale de Kinshasa. Entre-temps, le speaker de cette même institution dit ne pas ignorer certaines combines. Il s’agit, selon Godé Mpoyi, de certaines personnes ayant brandit de faux documents pour se procurer des véhicules appartenant à l’assemblée provinciale.
Dans son mot de circonstance à la manif de samedi, note Actualité.CD, Godé Mpoyi a parlé, sans le citer nommément, d’un ancien vice-président qui se serait donc procuré de faux documents pour acheter, à un prix dérisoire et comme une épave, une jeep faisant partie du charroi automobile de l’organe délibérant de la capitale.
Aussi, Godé Mpoyi a-t-il promis de traquer tous ceux qui se sont illustrés dans cette pratique mafieuse, en vue d’une action judiciaire. En d’autres termes, tous les détenteurs de faux documents de vente et d’achat des véhicules de l’assemblée provinciale de Kinshasa seront poursuivis.
Toutefois, le primum inter pares des députés provinciaux de Kinshasa ne cache pas son satisfécit, bien qu’encore partiel. Devant la presse, Godé Mpoyi a réitéré son engagement de rompre avec les vieilles pratiques du passé. Des pratiques à la fois immorales et déshonorantes reconnues généralement à tous ceux qui détiennent une parcelle de pouvoir, à quelque niveau de l’appareil d’Etat.
» J’ai une satisfaction partielle. Lors de ma prise de fonction j’avais promis aux Kinoises et Kinois que nous allons imprimer un nouveau management j’avais dit que tout celui qui détenait les biens de l’assemblée provinciale devrait les retourner. J’avais remis un moratoire de 48 heures mais les gens s’étaient exécutés faiblement. J’étais obligé de négocier avec les amis et cela a pris 30 jours. Comme les gens ne comprenaient pas que je suis le disciple de la rupture, j’étais obligé de recourir à la Police et je me suis investi personnellement. Nous avons récupéré une bonne partie de ces véhicules. Il y a eu un faux et les auteurs de ces faux seront poursuivis « , a-t-il déclaré.
QUAND LA JURISPRUDENCE NSINGI INTERPELLE
Rien de nouveau sous le soleil. Ce qui est reproché ce jour à Roger Nsingi, est loin d’être une première. Bien au contraire. Cependant, les faits éclairent, si besoin en est, la perception que se font la plupart des gestionnaires du pays, du bien de l’Etat congolais. La plupart des mandataires, pour ne pas dire tous, transforment les biens de l’Etat en leurs patrimoines privés. Et cela, depuis les années Mobutu.
Combien de membres du Gouvernement, de mandataires publics qui, à la cessation de leurs mandats, n’emportent pas tout ce qui avait été mis à leur disposition dans le cadre d’exercice de leurs fonctions ? En plus de véhicules, il y en a qui détournent même les meubles des maisons de l’Etat qu’ils occupaient au regard de leurs statuts.
Le tout se passe comme dans une sorte de pétaudière où les Premiers ministres, ministres, vice-ministres et autres responsables d’entreprises publiques, n’ont de compte à rendre à personne à l’expiration de leurs mandats.
Il s’agit donc, d’une sorte de loi non écrite depuis le régime du défunt maréchal Mobutu. Moralité, la pratique s’est enracinée au point que le détournement des biens publics devienne une récompense, un bonus indû pour des gestionnaires fin mandat. En ce qui concerne les institutions publiques, par exemple (Président de la République, Parlement, Gouvernement, Cours et Tribunaux, Administration publique), seuls les Travaux publics sont habilités à auditer les véhicules de fonction.
En d’autres termes, à la fin d’une législature, par exemple, le ministère des Travaux publics est fondé de récupérer tout le charroi automobile mis à la disposition de différentes institutions, de sorte que les véhicules se trouvant encore en bon état, soient confiés aux nouveaux responsables. Ainsi, on aura évité des dépenses inutiles au Trésor public. Hélas.
En ce qui concerne les assemblées provinciales, les choses devraient également se passer de la même manière.
A la fin du mandat, le bureau définitif sortant devrait, lors de la cérémonie de remise et reprise avec le bureau définitif entrant, présenter le patrimoine de l’organe délibérant de la province. En ce compris les véhicules. Mais combien s’astreignent à cet impératif ?
Tout bien considéré, la jurisprudence Nsingi sonne l’heure du respect et de la restitution des biens de l’Etat, par tous ceux qui les avaient acquis dans le cadre d’exercice de leurs fonctions, une fois qu’ils sont arrivés à la fin de leurs baux. Pourvu que les personnes concernées soient en capacité de tirer la leçon de l’interpellation, sur fond d’humiliation, de l’ancien président de l’Assemblée provinciale de Kinshasa. Grevisse KABREL
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