Clôturé à la Cour Militaire Opérationnelle du Nord Kivu, au mois de Novembre de l’an 2020, deux ans après son ouverture, le procès du redoutable chef milicien Ntabo Ntaberi alias SHEKA et consorts restera comme un des plus complexes et des plus longs procès en République Démocratique du Congo, dans le cadre de la lutte contre l’impunité des crimes graves.
Suivi de près tant au niveau national qu’international, cette affaire qui a connu la condamnation à perpétuité de Ntabo Ntaberi SHEKA et son complice Lionceau pour les crimes de guerre infligés à des civils dans le Nord Kivu, ne s’est pas terminé sans laisser de traces ni faire couler assez d’encres et de salives.
Six mois après le verdict rendu, les parties au procès, les avocats, les organisations ayant appuyé le dossier sont questionnés pour faire le point sur comment ont-ils vécu le processus judiciaire ? Si, ce dernier a-t-il permis une forme de réparation ou a-t-il donné le sentiment que justice a été faite ?
Condamnations à perpétuité, Acquittement, dommages alloués,… le temps mauvais ami !
La pilule est toujours amère à avaler pour les avocats de la partie défenderesse. Ces derniers s’en tiennent sur la forme, arguant que la décision de la juridiction n’est pas conforme à l’équité car elle n’a pas pris en compte les moyens de défense.
Toujours pas de jugement à la disposition des parties ! Pour les avocats des victimes, on crie au scandale car le délai est largement dépassé.
« Six mois après le verdict, l’arrêt n’est toujours pas exécuté donnant l’impression d’une banalisation des aspects liés aux vues et préoccupations des victimes telles que présentées au cours du procès et reconnues dans l’arrêt » s’est exclamée Me Nadine SAYIBA, une des avocates du collectif des victimes.
A elle d’ajouter que dans pareille affaire, les acteurs réunis pour soutenir la lutte contre l’impunité des crimes graves, doivent s’assurer que tous les éléments cumulatifs de l’évaluation de l’accès à la justice soient réunis : notamment l’exécution des décisions judiciaires à travers le droit des victimes à la réparation des préjudices subis. La vraie justice doit être totale, formelle et globale. L’avocate poursuit en disant que la justice n’est pas seulement une condamnation plutôt la réparation matérielle et psychologique.
Ce serait l’occasion de rappeler que des réflexions profondes autours des mécanismes de justice transitionnelle ne devraient aucunement être négligées en vue de juguler la question de réponse judiciaire attendue avec tant de soif par les victimes des Crimes commis en RDC et dont les cas jugés prioritaires sont déjà renseignés.
Pour Mr CHUMA Roger, frère cadet du feu le colonel CHUMA mutilé par la milice Nduma Defense of Congo (NDC) conduite par Ntabo Ntaberi alias SHEKA, la réparation n’est pas encore effective. Ce jeune que nous avons joint depuis le territoire de Walikale ce 21 mai 2021 dit ne pas être au courant des dommages et intérêts attendus ni l’état de la procédure en la matière, même si l’argent ne peut égalerla perte en vie humaine subie par la famille de cet officier FARDC tué dans les combats.
Assertion soutenue par Me Justin NGANDU du collectif des avocats de la défense. Ce juriste doute de la faisabilité d’indemnisation matérielle au regard du seuil de pauvreté des accusés. Il soutient qu’il faut aller voir d’autres mécanismes pour rendre argent ; maisons ; bétails ; meubles et autres biens aux bénéficiaires du jugement de la cour militaire opérationnelle du Nord Kivu.
De son côté, Avocat Sans Frontières (ASF) reste optimiste et travaille dans le but d’obtenir la réparation des victimes tel que prononcé par la Cour, a dit Me Jules RUHUNEMUNGU.
Nos tentatives pour en savoir sur la disponibilité de l’arrêt en dur n’ont pas payé.
Pendant ce temps, les parties au procès attendent toujours l’exécution du jugement, afin qu’elles soient rétablies dans leurs droits.
Signalons que RCN Justice & Démocratie (RCN J&D) a appuyé la couverture médiatique du procès et la publication de cet article dans le cadre du projet « soutenir les efforts de la lutte contre l’impunité en RDC ».
Par MARIE NOEL KABUYA
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