« Nous tenons encore aujourd’hui, mais en janvier ça sera catastrophique ». C’est une inquiétude du premier vice-président de la société civile du territoire de Lubero. Joseph Mahamba fait allusion à la situation humanitaire des déplacés à Lubero-centre, chef-lieu du territoire de Lubero (Nord-Kivu). Depuis deux semaines maintenant, l’agglomération accueille des nouvelles vagues de déplacés en provenance du sud-centre du territoire.
« Tout Lubero sud, toute la population de la zone centre de Lubero s’est déversée ici. D’autres sont exactement à Kipese, Masereka, Kimbulu, Musienene et Butembo, mais ici il y a le grand nombre de déplacés », indique-t-il.
Joseph Mahamba nous fait visiter un site temporaire de déplacés, érigé à Lubero-centre avec l’appui de l’organisation action et intervention pour le développement social (AIDES).
« Les familles d’accueil était déjà submergées, depuis 2022 quand la guerre a avancé vers Kanyabayonga, il y avait déjà quelques déplacés ici. La situation s’est aggravée en Juin 2024 quand les rebelles du M23 ont avancé vers Kanyabayonga, Kayna et Kirumba. Des familles sont arrivées en masse et certaines étaient obligées de loger dans des écoles, des églises et des maisons abandonnées dans la commune. C’est comme ça que nous avons réfléchi à comment ériger un site d’accueil afin de permettre aux déplacés qui sont dans des écoles de venir ici. L’appui de AIDES nous a permis de faire quelques hangars », explique Joseph Mahamba.
La vie dans le site collectif des déplacés
Ce site collectif est situé dans la concession de l’administration du territoire de Lubero au quartier du 30 Juin vers Magasin à Lubero-centre. Au moins 5 hangars construits en planches sont érigés ici, d’autres n’ont pas des portes moins encore des fenêtres. Sur place, nous retrouvons 30 à 40 familles dans un seul hangar. « Nous avons fui Alimbongo jusqu’ici. Nous étions dans des balcons sur la route et on nous a dit qu’il y avait un site réservé pour les déplacés. Nous sommes venus nombreux occuper ces hangars inachevés. Comme vous le voyez, nous passons la nuit sur le sol, quand il pleut la nuit ou même la journée, nous sommes obligés de suspendre nos effets sur le mur car les eaux de la pluie traversent ces hangars. Nous supportons toutes sortes d’intempéries dans ce site, on n’a pas le choix », raconte une femme déplacée hébergée dans ce site.
Pourtant ce site était réservé aux vagues de déplacés qui avaient fui en Juin 2024 explique Joseph Mahamba. « Ces familles que vous voyez ici, sont celles arrivées il y a deux semaines. Alors qu’on était en train de construire, les hostilités se sont déclenchées à nouveau vers Mathembe, Vutsorovya, Hutwe, Alimbongo et environs. Cette nouvelle vague accueillie a directement occupé ces hangars construits pour les déplacés arrivés en Juin dernier ».
Plus de 50 000 familles déplacés à Lubero-centre
Plus de 50 000 ménages sont enregistrés pour le moment à Lubero. La société civile s’inquiète car la situation humanitaire risque de s’aggraver davantage.
« Jusqu’ici nous avons enregistré 13 000 ménages déplacés pour la nouvelle vague venue depuis l’avancée des rebelles du M23 de Mathembe vers Alimbongo il y a plus de 10 jours maintenant. En Juin dernier, on avait déjà plus de 40 000 ménages pour lubero-centre seulement sans compter les périphéries. Nous avons au total 53 000 ménages et d’autres vagues continuent à arriver les anciens et les nouveaux. », fait savoir Joseph Mahamba.
« Le mois de Janvier s’annonce très compliqué pour les déplacés de Lubero-centre »
La commune peut contenir ces déplacés aujourd’hui grâce à l’appui alimentaire que le Programme Alimentaire Mondial (PAM) a donné quelques jours avant la reprise des hostilités dans le sud. Mais le désespoir est grand car le stock s’épuise.
« C’était une aide consistante pour les mois de Novembre et de Décembre. Que ça soit à Lubero-centre, Kimbulu et Musienene et même Butembo, le PAM a vraiment aidé les déplacés. Mais cette ration va s’épuiser très rapidement vu le nombre élevé des déplacés. Et donc d’ici Janvier 2025, nous serons face à une difficulté alimentaire. Déjà les soins de santé constituent un autre problème au côté de l’eau et de l’éducation pour les enfants déplacés. Un SOS est lancé pour venir avant que le pire ne soit vécu. Le mois de Janvier s’annonce très compliqué par rapport à la situation humanitaire des déplacés de Lubero. Il nous faut une réponse adéquate pour pallier ce problème », lance-t-il.
La situation humanitaire est catastrophique dans le territoire de Lubero depuis plus de deux ans. Le sud surtout est confronté à un besoin humanitaire criant. L’hémorragie se poursuit dans le Nord déjà confronté depuis 2014 par un déplacement de population suite aux massacres des civils par les territoires ADF et d’autres groupes armés locaux et aujourd’hui, la résurgence du mouvement du 23 Mars qui vient amplifier davantage la situation sécuritaire et humanitaire.
Asaph LITIMIRE
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